L’abbaye de Noirlac éveille notre écoute dans une visite sonore inédite (2024)

Isolée au creux d’un bocage verdoyant, à quelques mètres du Cher, l’abbaye de Noirlac se découvre à l’écart de l’agitation, simple et sereine. Le vent qui souffle en ce matin d’avril fait jouer des alternances de lumière et d’ombres sur sa belle pierre blonde. Il agite les feuilles des arbres, fait frémir les hautes herbes, animant le silence de la campagne environnante de bruissem*nts inconnus en ville, prémices d’une aventure sonore étonnante.

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La campagne a raison d’être en éveil. Après de longues années de réflexion, l’abbaye, construite à partir du milieu du XIIe siècle, connaît un printemps unique dans sa longue histoire (lire les repères). Elle propose désormais au visiteur un parcours de visite sonore, qui vient réveiller les pierres et habiter ces espaces dénudés.

Une symphonie subtile de notes

Que ceux qui craignent les dispositifs invasifs soient tout de suite rassurés : l’équipe de l’abbaye de Noirlac, labellisée Centre culturel de rencontre en 2008, a parfaitement négocié ce virage créatif. Ici, le visiteur ne sera pas assailli par les sons et il ne sera pas encombré d’audioguides, de tablettes ou de casques de réalité virtuelle. Il déambulera librement, guidé par une symphonie subtile de notes, qui se déclenchent à son passage grâce à des aménagements invisibles respectant parfaitement les lieux.

Du cloître au dortoir des frères convers, de l’abbatiale au réfectoire, le voilà porté par les sons, explorant par l’ouïe ces espaces d’une grande sobriété, laissant vagabonder son esprit au gré des images mentales et des émotions intérieures qui naissent depuis le creux de son oreille. Il se surprendra aussi à s’intéresser aux silences, à percevoir leurs pleins et déliés.

Dans le jardin du cloître dessiné par le paysagiste Gilles Clément, qui évoque les « reflets du ciel » à travers des massifs de fleurs bleues en forme de nuages, une brume sonore croise l’univers humain et l’univers naturel. Juste à côté, dans les galeries bordées de colonnettes, le chuchotement d’un psaume en latin rappelle la prière qui longtemps habita ces lieux.

Dans l’église abbatiale, le son se déploie plus amplement. Des miniatures sonores pour solistes, 80 courtes créations dépouillées et majestueuses, sont diffusées dans ce grand vaisseau de pierre. Clarinette basse, serpent, violoncelle, flûte kaval, chant de haute-contre ou chant diphonique dialoguent avec les voûtes, à la réverbération exceptionnelle. À l’étage, sous l’impressionnante charpente en bois du vaste dortoir des frères convers, ce sont les sons du bocage environnant qui s’offrent au fil des quatre saisons, grâce à la phonothèque patiemment enregistrée par Fernand Deroussen, audio-naturaliste.

« Écoute ! »

Seul le chauffoir – scriptorium où les moines recopiaient les manuscrits dans la seule pièce chauffée de l’abbaye – donne voix aux moines, sous la forme d’un long poème imaginé par Lola Molina et mis en musique par Lélio Plotton, en quatre monologues qui s’entrecroisent. Une parole burinée par le travail, rythmée par la prière, tannée par les éléments naturels, patinée par une fidélité au quotidien. Et habitée par une quête spirituelle, où même le nom de Dieu s’émonde.

L’ensemble du parcours apparaît comme le fruit à maturité d’une collaboration étroite entre les artistes et ce lieu exceptionnel. « Tous ceux qui se sont lancés dans cette aventure avaient depuis longtemps un lien et une proximité avec Noirlac, pour être venus donner des concerts ou faire des enregistrements dans l’abbaye », confirme Élisabeth Sanson, sa directrice.

La qualité artistique du projet, la liberté laissée au visiteur – qui peut rester écouter plus ou moins longtemps chaque proposition – et le caractère aléatoire de la diffusion des compositions sont le gage que ce parcours sonore conservera longtemps sa fraîcheur. « Écoute ! » dit la règle de saint Benoît en son prologue. Grâce aux artistes, cette invitation résonne encore à Noirlac, sous une forme inédite.

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Une riche histoire

1136 : Installation d’une première communauté cistercienne venue de l’abbaye de Clairvaux (Aube) sur le site

1150 : Lancement de la construction de l’édifice

1530 : En déclin depuis la fin du XVe siècle, l’abbaye est soumise au régime de la commende.

1712 : Reconstruction de l’aile des moines.

1791 : Devenue bien national et désacralisée à la Révolution, l’abbaye devient la résidence secondaire d’un riche notable.

1822 : Installation d’une manufacture de porcelaine

1862 : Classem*nt au titre des monuments historiques

1909 : Acquisition par le département du Cher.

1939 : Noirlac accueille des réfugiés républicains espagnols.

1950-1980 : Restauration complète

2008 : Labellisation en Centre culturel de rencontre

2024 : Inauguration du parcours sonore résoNance.

Rens. : 02.48.62.01.01 et abbayedenoirlac.fr

L’abbaye de Noirlac éveille notre écoute dans une visite sonore inédite (2024)

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